« La
mort des amants »(1857)
De Charles
Baudelaire (1821-1867)
- Orphelin de père dès six ans.
- Après le baccalauréat il mène une vie de bohème.
- Pour pallier à cela, sa famille le convainc de faire un voyage lointain « pour son bien », c’est ainsi qu’il découvre l’île Maurice et l’île de la Réunion.
- De retour à Paris, il dilapide l’argent qu’il a hérité de son père.
- Suite à un conseil judiciaire demandé par sa mère, il perçoit une modeste rente mensuelle.
- Il fait plusieurs tentatives de suicide.
- En plus d’être poète, il est critique d’art.
- Il meurt à Paris des suites d’une crise d’apoplexie.
Mouvement
littéraire :
Il est impossible de classer précisément l’œuvre de Baudelaire qui tient autant
du Parnasse que du romantisme. Mais il ne faut pas oublier que Baudelaire est
un précurseur du symbolisme.
Genre : poème, sonnet
Problématiques
possibles :
Comment Baudelaire passe d'une forme
poétique traditionnelle, le sonnet, à des images plus modernes de la mort ? Pourquoi
peut-on dire que le poète se trouve entre antiquité et modernité ? Comment
Baudelaire fait-il de la mort un « Idéal » ?
Situation du
passage :
« La mort des amants » est (aussi bien dans l’édition de 1857 que
dans celle de 1861) le premier poème de la dernière section intitulée « La
mort ».
Idée 1 : Une
description surprenante de la mort :
- Une mort synonyme de promesses :
Utilisation
du futur : « aurons » (v1), « réfléchiront » (v7),
« viendra ramener » (v13) [ le poète semble déjà avoir
visité cet au-delà
« Des
divans profonds comme des tombeaux » (v2) [ la comparaison entre un
« divan » et des « tombeaux » fait référence à une chambre
d’amants faisant de la mort un lieu d’union parfaite
Champ
lexical du feu « chaleurs » (v5), « flambeaux » (v6) [ ce lieu chaud et lumineux
semble opposé à la mort
« Nos
deux cœurs seront de vastes flambeaux » (v6) [ métaphore qui rappelle la vie
« joyeux »
(v13), « odeurs légères » (v1), « fleurs » (v3) [ un lieu agréable
- Le début d’une nouvelle vie :
« rose
et bleu » (v9) [ référence à la layette d’un bébé
« ranimer »
(v13) [ redonner de la vie à des
« miroirs ternis » (v14) et à des « flammes mortes » (v14)
« fleurs »
(v4) [ un lieu beau
« cieux
plus beaux » (v4) [ superlatif qui désigne un lieu
meilleur que celui de la vie « terrestre »
- Un lieu d’union parfaite :
« Nos
deux cœurs seront de vastes flambeaux,/Qui réfléchiront leurs doubles
lumières/Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux. » (v6, 7, 8) [ association « deux
flambeaux »-« doubles lumières » et
« réfléchiront »-« miroirs jumeaux » ils semblent être fondus
l’un en l’autre
Chiasme
« cœurs »-« flambeaux »/ »lumières »-« esprits »
[qui montre que cette union
amoureuse prend une dimension spirituelle
« étrange »
(v3), « mystique » (v9) [ un lieu mystérieux difficile à
décrire et à imaginer
- Un lieu d’abondance :
« divans »
(v2), « fleurs » (v3), « lumières » (v7), « écloses
pour nous » (v4) [ l’utilisation de nombreux pluriels donne une
impression de luxe et d’abondance (référence à la citation de Baudelaire
« Tout n’est que luxe, calme et volupté » tirée de « L’invitation
au voyage »)
Les
sonorités douces « f », « v », « g » traduisent
le calme et l’abondance
Cette
abondance dans la mort est opposée à l’image traditionnelle de la mort où il ne
reste rien que le néant
Idée 2 : Le
tombeau, le lieu de sublimation des êtres et de l’amour :
(sublimer :
élever quelque chose au-dessus de lui-même)
- Un amour parfait :
La
progression du poème : « deux », « nous » dans les
deux quatrains puis singulier « unique » dans le premier tercet puis
à nouveaux pluriel dans le dernier tercet [ amour parfait et union
parfaite entre deux êtres
« Nos
deux cœurs seront de vastes flambeaux » (v6) [ la répétition de
« deux » met les deux êtres à égalités, ils sont identiques (chacun
se reconnait dans l’autre) : « doubles lumières » (v7),
« nos deux esprits » (v8), « miroirs jumeaux » (v8) [ réciprocité
- Une élévation spirituelle :
« odeurs
légères » (v1) [ traduit la légèreté de ce qui s’élève
« étagères »
(v3) [ une échelle qui monte au ciel
« cieux »
(v4) [ connotation spirituelle
(+ »esprits ») cf chiasme ci-dessus
Idée 3 : La
mort, synonyme d’élévation spirituelle, de renaissance :
- Les références au sacré comme l’accès à l’Idéal de Baudelaire
« un
Ange, entr’ouvrant les portes » (v12) [ référence aux portes du
paradis, début d’une vie spirituelle (+emploi du futur (cf idée 1))
Le
vocabulaire de la naissance : « « écloses » (v4),
« ranimer » (v13) (anima : âme en latin) [ renaissance spirituelle qui
baigne dans de multiples lumières démultipliées par leurs reflets
« cieux »
(v4), « bleu mystique » (v9) [ hypallage, le
« bleu » rappelle les « cieux », la dimension sacrée des
« cieux » s’applique ici à la couleur « bleu »
« double
lumière » (v7) [ métaphore de la lumière divine
« éclair
unique » (v10) [ la lumière par essence qui donne accès à une
connaissance supérieure et qui permet d’exister par le regard de l’autre
« tombeaux »
(v2)-« étagères » (v3)/« profond »-« cieux » [ opposition entre la haut et
les bas
Ce
poème traduit un passage vers un au-delà paradisiaque / vers la Connaissance
Idée 4 :
Beauté étrange du poème, l’évocation d’un Idéal indicible qui serait atteint
dans la mort :
(indicible :
que l’on ne peut pas dire)
- Les synesthésies :
(synesthésie :
procédé très utilisé par Baudelaire qui consiste à créer des correspondances
entre des sensations-synesthésies horizontales-, à rapprocher les qualités de
quelque chose de terrestre d’une autre chose)
« lumières »,
« parfums » correspondent au « bleu mystique » [ accès à un monde supérieur par
les sensations d’ici-bas
« bleu
mystique » (v9) [ désigne quelque chose de sacré que tout le monde
comprend mais que personne ne peut nommer
« odeurs
légères » (v1) [ donne une dimension spirituelle à quelque chose
de sensitif
- Images nouvelles et étranges :
« étranges
fleurs » (v3) [ mise en valeur de l’adjectif
« étranges » par son antéposition et par les sonorités rime
« divans » (v2)-« étranges », paronomase (sonorités
proches) « étranges »-« étagères », association peu commune,
inattendue
« vastes
flambeaux » (v6) [ l’antéposition de l’adjectif le met en valeur,
cette image est mystérieuse, indistincte par opposition au reste du texte écrit
a l’indicatif (qui exprime des certitudes)
« miroirs
jumeaux » (v8) [ le mystère de la gémellité qui est difficile à
admettre pour l’homme
« miroirs
ternis » (v14) [ cette expression est presque une oxymore, par
définition un miroir et brillant, s’il est terne il ne remplit plus sa fonction
de miroir
« flammes
mortes » (v14) [ oxymore et allitération en « m » qui
réunit étonnamment les deux mots
- La forme et la fonction du poème :
Baudelaire
utilise le sonnet de Pétrarque, « à l’ancienne » avec des
décasyllabes (le sonnet classique est un alexandrins) [ rythme régulier du poème
En
utilisant le futur, Baudelaire décrit cet au-delà étrange comme s’il le
connaissait déjà, il transmet ainsi au lecteur des connaissances spécifiques du
poète (le poète est alors un intermédiaire (comme Orphée qui est revenu du
monde des morts) entre les hommes et un monde « supérieur », un
au-delà de la Mort)
Conclusion :
Ce
poème montre l’aboutissement de la quête du poète qui a enfin trouvé un Idéal
lui permettant d’échapper à l’Ennui … mais dans la mort.
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